Menu

jeudi 22 octobre 2020

Le Roi des Krols (Le Livre des Purs T1) - Olivier Martinelli

 

 
J'avais choisi Le Roi des Krols, premier tome du diptyque Le Livre des Purs, à l'occasion de la masse critique Babelio autour des "mauvais genres". Je remercie donc Babelio et les éditions Leha pour l'envoi du livre. Malheureusement je n'ai vraiment pas accroché. En lisant le résumé, j'ai cru que ce serait une histoire passionnante, mais j'ai été grandement déçue. Et le problème quand je suis déçue, c'est que je râle beaucoup, donc ma chronique risque d'être un peu longue (elles sont toujours un peu longues, je sais) et quelque peu virulente...
 
Voici le résumé éditeur : 
De paisibles villages Belecks, nichés au fond d’une vallée perdue, sont attaqués un soir par une armée innombrable et effroyable venue les anéantir. Leurs ennemis séculaires, les Palocks, sont venus pour s’emparer d’un manuscrit qui confère un grand pouvoir à ceux qui le possèdent.
Comme les jeunes de son âge, Daan, formé depuis la naissance au maniement de l’épée, doit combattre pour sauver son peuple. Au cours de cette sanglante bataille, il voit son père, qu’il croyait simple charpentier, se transformer en terrible chef de guerre.
Ainsi débute une épopée qui va donner naissance à des légendes dont celle d’un héros hors du commun : Daan le Rouge.

Bon, alors, ce qui m'a rebutée dès le début, c'est le temps de la narration. L'histoire est racontée soit selon le point de vue de Daan, soit selon un point de vue omniscient. Jusque-là, ça va. Le problème c'est que, lorsque c'est Daan qui raconte son histoire, le récit est au passé composé. Et c'est marrant, parce qu'il y a peu de temps, j'avais justement reproché l'utilisation du passé composé dans un autre roman (une romance, cette fois-ci). Je vais donc reprendre ce que j'avais dit pour cet autre roman : pour moi, le passé composé n'est pas un temps adapté pour une longue narration. Dans de tels récits on utilise plutôt le présent ou le passé simple (ce qui a été fait pour les chapitres racontés par le narrateur omniscient), le passé composé étant plutôt un temps adapté à l'oralité, donc à employer dans des discours directs (par exemple : un personnage qui raconte à un autre ce qu'il a fait à un moment passé). C'est mon opinion, en tout cas, et je n'aime vraiment pas lire un roman écrit au passé composé, c'est rédhibitoire.
J'ai quand même continué ma lecture. D'une part parce que les éditions Leha ont tout de même pris soin de m'envoyer ce livre, j'estimais donc normal d'aller jusqu'au bout. D'autre part car l'histoire avait l'air vraiment pas mal donc je me suis dit que je parviendrais peut-être à passer outre ce (gros) défaut.

Malheureusement, un auteur a beau avoir de bonnes idées, si le reste ne suit pas, ça ne sert à rien.
Bon, je vais essayer d'abord d'expliquer vite fait le contexte. Au début du roman, les Belecks, qui vivent au nord de l'île de Leck, sont présentés comme un peuple guerrier divisé en plusieurs clans, chaque clan dirigé par un chef. Dès l'enfance, les Belecks sont entraînés pour être des guerriers, les hommes comme les femmes. Au sud de l'île vit le peuple Krol, considéré par les Belecks comme des faibles et des lâches. Daan est un Beleck, et le fils de Kal, simple charpentier. Du moins c'est ce qu'il croyait. Car lorsqu'un peuple ennemi, les Palocks, attaque l'île, Kal se montre sous son vrai jour : un grand guerrier, un chef, un roi. Car avant que les Belecks ne migrent vers le nord de l'île, ils vivaient avec les Krols, dont ils étaient les protecteurs, et dont Kal était le roi. Je ne dirai pas pourquoi les Belecks sont partis, car ça fait partie des choses à découvrir (j'en ai déjà révélé pas mal). Comme autrefois, les Belecks se mettent alors en guerre contre les Palocks pour les chasser de leur île et récupérer les femmes vierges qu'ils ont enlevées. (Oui, des vierges, parce qu'apparemment les Palocks ont besoin de femmes vierges pour se reproduire.) Entraînés par leur père, Daan et ses frères et sœur se révèlent être des combattants redoutables (un peu trop, d'ailleurs).
Là on se dit que l'on va avoir droit à beaucoup d'action. Et c'est le cas. Le Roi des Krols est un roman de fantasy épique, et de l'épique, on en a à la pelle. Trop, d'ailleurs. Car finalement ce n'est que ça : une multitude de combats et de batailles. En quoi est-ce mal, me direz-vous. Et bien déjà parce que l'auteur consacre tellement son roman à cela qu'il en oubli l'essentiel : les personnages. En général, dans mes chroniques, je consacre un bon bloc sur les personnages. Mais là je n'ai pas grand-chose à dire dessus, car ils ont été très peu travaillés. Franchement, je n'ai pas vu de grande différence entre Daan et son frère Lak, ils pourraient être interchangeables, comme beaucoup d'autres personnages. Kal est un peu plus charismatique, mais on ne sait quasiment rien de lui, à part que c'est un homme distant et un grand chef de guerre. En gros les "héros" sont courageux, forts, malins et loyaux, tandis que les méchants (y compris les traîtres) bah, ils sont juste méchants, cruels, etc. (et un peu malins aussi, sinon il n'y aurait pas de challenge). C'est très manichéen, tout ça... Bref ! Tout ça pour dire qu'il y a tellement peu de temps mort dans ce roman qu'on ne s'arrête jamais vraiment sur la personnalité des personnages, on n'apprend pas vraiment à les connaître en dehors des batailles. D'ailleurs Daan parle de deux événements qui ont changé sa vie : l'attaque des Palocks, et sa rencontre avec la fille du chef des Fradins (un peuple allié vivant sur une autre île). Alors pour ce qui est des attaques et des Palocks, on en a à ras-bord. Par contre on voit très peu cette fameuse fille de chef : dans le (très court) chapitre où il raconte leur rencontre (elle lui a flanqué un bonne raclée) et vers la fin lors de l'une des dernières batailles (le chef parle du fait que Daan aurait conquis le cœur de sa fille). Au final on ne les voit jamais ensemble. Alors je veux bien croire que regarder un homme se battre puisse séduire, mais de là à présenter cela comme une histoire d'amour entre les deux... Ce n'est pas très crédible, comme beaucoup de choses dans ce roman (mais je ne peux pas les citer car je dévoilerai des éléments de surprise).
 
Je n'ai pas été conquise par les personnages, donc, comme je n'ai pas du tout accroché à la partie épique. J'adore quand il y a des batailles dans les romans de fantasy, mais quand il n'y a que ça, c'est lassant. D'autant plus quand rien n'est développé. Je m'explique : il y a pas mal de passages intéressants et intenses, hélas tout est raconté trop brièvement, ce qui donne l'impression que les choses vont trop vite et sont trop faciles. Par exemple, la légende de Daan le Rouge : on le nomme ainsi car il a tué un grand nombre d'ennemis, le crâne en sang, en voulant accéder à la grille permettant d'ouvrir le passage des alliés dans une ville assiégée. Et bien cela tient sur deux petits paragraphes. Tout est trop succinct, dans ce livre : les actions comme les discours. J'ai eu devant les yeux plein de batailles, pourtant je me suis sentie terriblement frustrée. J'ai passé mon temps (au moins une fois par page) à lever le nez de mon livre pour regarder ailleurs (ou penser à autre chose), parce que je m'ennuyais. Il y a un manque cruel d'originalité ici, l'auteur se contentant simplement de reprendre les codes de la fantasy épique. On se retrouve, dans cette histoire, face à un schéma ultra répétitif : les gentils sont en sous-nombre à chaque fois, mais ils trouvent toujours un plan un peu fou pour palier à ça et gagnent la bataille contre les méchants. Alors ça passe quand ça arrive une ou deux fois, mais ici c'est tout le temps le cas. Du coup j'ai eu l'impression de lire sans cesse la même chose, c'était vraiment lassant.

Tout un tas de sujets intéressants sont évoqués dans ce roman, mais ils sont très peu développés.
Je pense notamment à la question de la place de la femme au sein des différents peuples. Chez les Belecks, les Fradins et les Velins (autre peuple allié vivant sur une autre île), les femmes sont aussi des guerrières. Je me suis dit que c'était sympa de les mettre sur le même plan que les hommes, mais en fait il y a quand même une certaine distinction homme/femme. Ainsi chez les Belecks, les femmes sont seulement archères : elles apprennent le tir à l'arc, mais pas l'épée, la lance ou la hache, qui sont des armes réservées aux hommes. (Sont-elles considérées comme trop faibles pour cela ?) En tout cas ces guerriers semblent fiers de cette "égalité", et cela est accentué par le fait que les Palocks, eux, considèrent que les femmes sont faites pour s'occuper de la maisonnée et faire des enfants. Ils enlèvent d'ailleurs des femmes (vierges, car apparemment virginité est synonyme de pureté) pour pouvoir se reproduire. Donc on a là de quoi faire. Mais l'auteur balance juste une ou deux phrases sur cette différence, à coups de "chez nous les femmes font ceci mais pas chez eux". Et c'est tout. L'auteur balance ça et ne développe rien derrière. Surtout qu'il n'y a qu'un seul personnage féminin un tant soit peu mis en avant : Zila, la sœur de Daan, qui est une archère hors pair. Les autres personnages féminins qui auraient pu avoir de l'importance (la fille du chef des Fradins, par exemple) ne sont quasiment jamais présents.
En fait, rien n'est vraiment développé dans ce roman, qu'il s'agisse des actions, des personnages, des thèmes, mais aussi des descriptions. Que l'auteur décrive un individu, une bête ou un lieu, il est toujours avare de détails. J'ai vraiment eu du mal à m'immerger dans son univers et à imaginer les créatures qu'il a créées. Daan s'émerveille en découvrant la cité des Krols, mais je n'ai pas pu ressentir cela car la fameuse cité n'a quasiment pas été décrite. L'auteur met simplement en avant la différence entre le village montagneux et clos où vivent les Belecks et la grande cité des Krols avec vue sur la mer (d'où l'impression d'espace et de liberté ressentie par Daan). Et vous voyez la grosse bête sur la couverture du livre ? Eh bien l'auteur dit simplement que ce sont des bêtes plus grosses qu'un cheval et qu'elles ont six pattes (c'est d'ailleurs comme ça qu'elles sont nommées : des six-pattes). On devine qu'elles ont des griffes car elle arrivent à grimper aux murailles (et encore, si ça se trouve c'est moi qui ai imaginé ces griffes à cause de la couverture). Et c'est tout. Ou alors j'ai zappé des éléments parce que je n'arrivais pas à me concentrer sur l'histoire. C'est possible aussi, car il m'a parfois fallu relire des paragraphes plusieurs fois pour réussir à me focaliser sur ce qui y était écrit. C'est dire comme ce livre m'a passionnée...

En bref...
Le Roi des Krols ne tient pas du tout ses promesses. Décrit comme un roman de fantasy épique riche en rebondissements, il a malheureusement été bien peu travaillé. Les personnages ne sont pas fouillés et sont terriblement clichés. L'auteur reprend à la lettre les codes de la fantasy épique, offrant ainsi une histoire manquant cruellement d'originalité. Certes, de l'action, des combats, des batailles... il y en a à foison. Mais rien n'est développé ici, rendant ainsi l'immersion plutôt compliquée tout en donnant l'impression que tout se déroule trop rapidement et trop facilement. L'intrigue, qui promettait un bon moment d'évasion, en devient alors ennuyante et ce, malgré quelques passages intéressants et plutôt intenses. Une grosse déception.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire