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mardi 29 septembre 2020

La Reine courtisane - Anna Triss

 

 
J'avais repéré Anna Triss pour sa série de bit-lit Myrina Holmes, dont le premier tome est paru cette année et qui me tentait bien mais que je n'ai malheureusement pas encore lu. Du coup La reine courtisane est le premier roman de cette autrice que je lis, une bonne petite découverte.

L'histoire se déroule dans un univers de fantasy totalement créé par l'autrice et qu'elle développe également dans une série à paraître en 2021 intitulée La Guilde des Ombres.
Notre intrigue se passe plus précisément sur l'île Symbiose, dont les habitants possèdent des pouvoirs en lien avec les éléments. Ainsi l'île est dirigée par quatre Éléments-Clans : le Clan Gelane affilié à l'Eau, le Clan Falune affilié au Feu, le Clan Tilone affilié à la Terre et le Clan Voline affilié à l'Air ; et ceux qui ne possèdent aucune magie, les Sans-Pouvoirs, sont bannis. Mais après des siècles de paix, Sylvan, le roi Falune, a déclaré la guerre aux autres Clans pour régner sur tout Symbiose. Après avoir vaincu les Clans de Tilone et Voline, dont il a épousé les princesses pour les exécuter le lendemain des noces, Sylvan s'en prend à présent au Clan Gelane.
Alena, reine Gelane, se voit ainsi emmenée de force jusqu'au palais du Clan Falune où elle sera mariée de force au roi tyran. Alena ne se fait pas d'illusions, elle sait ce qui l'attend ensuite. Pourtant elle refuse d'abandonner et fera tout pour survivre, ne serait-ce qu'une journée de plus, sans pour autant perdre sa fierté.

Quand j'ai lu le résumé, je me suis dit "Tiens, ça me rappelle un peu Les mille et une nuits" avec l'histoire de ce sultan au cœur brisé suite à une trahison qui décide de tuer ses épouses le lendemain des noces. J'avais un peu peur que ce soit ça, une simple réécriture de cette histoire. Et quand j'ai lu le début du livre, j'ai vraiment cru que ce serait bien ça. Car la première idée qu'a Alena pour survivre à sa première aube en tant que reine Falune, c'est de raconter une histoire à son époux et de le tenir suffisamment en haleine pour qu'il veuille entendre la suite, qu'elle repousse au lendemain soir. Bien sûr Sylvan n'est pas dupe de son manège, mais finit tout de même par accepter. Cela commence donc avec cette dynamique de "je te raconte la suite si tu me laisse un sursis", où l'on découvre en même temps que Sylvan les histoires d'Alena qui sont étrangement très liées à la situation ainsi qu'au présent et au passé des personnages. Heureusement les choses évoluent par la suite et l'on quitte cette dynamique pour entrer dans les intrigues de cour et les complots. Je ne dis pas que cette partie n'était pas bien, au contraire c'était intéressant, mais je pense que je me serais vite lassée si tout le roman avait été bâti sur ce schéma.

En ce qui concerne les personnages, j'ai apprécié les deux principaux ainsi que quelques secondaires, et j'en ai détesté d'autres (une en particulier mais je ne peux pas en parler sans gâcher la surprise).
Alena est une jeune femme forte et fière qui n'a pas toujours eu la vie facile, contrairement à ce que tout le monde pense. Au sein du Clan Falune, elle doit faire face à la haine de Sylvan et de ses guerriers, et aux regards méprisants (et parfois bien pervers) de tous ceux qui la jugent sans la connaître, en fonction des rumeurs qui circulent à son sujet. Heureusement son intelligence et sa superbe répartie vont lui permettre de survivre dans ce nid de vipères, tout en cachant un secret qui pourrait signer son arrêt de mort si quelqu'un venait à le découvrir. J'ai d'ailleurs beaucoup aimé les joutes verbales entre Alena et Sylvan, qui m'ont bien amusée. Je ne peux pas trop en dire sur elle sans gâcher certaines surprises (même si on parvient à en deviner quelques-unes), mais c'est un personnage qui m'a plutôt bien plu, même si je l'ai trouvée par moments un peu trop naïve.
Sylvan a déclaré cette guerre pour une raison particulière qui n'est pas forcément celle que tout le monde croit (je n'en dirai pas plus) et doit faire face aux conséquences d'une telle décision. Ainsi son peuple le prend pour un tyran, les autres clans pour un monstre assoiffé de pouvoir. Pour mener à bien son objectif, il s'est alors construit une barrière derrière laquelle il cache l'être qu'il est réellement, pour ne montrer aux autres que froideur et puissance. Mais Alena va parvenir à trouver la faille et apprendre à connaître véritablement son époux, l'homme généreux et profondément blessé qui se cache derrière la bête.
Bon, ça fait très cliché, me direz-vous. C'est vrai que ça a davantage l'air d'une romance que d'un livre de fantasy épique. En effet, la romance est grandement mise en avant ici, mais l'aspect fantasy garde tout de même une place importante.

L'univers créé par l'auteur est plutôt bien réfléchi et je dois avouer que j'ai été assez frustrée : quand un univers m'intéresse, j'aime qu'il soit développé au maximum de son potentiel. Le problème, c'est que c'est difficilement le cas dans un one-shot si l'on ne veut pas en faire un pavé ou bâcler l'intrigue. Je ne dis pas que c'est impossible, mais c'est rare. Le format de la série, auquel je suis davantage habituée en fantasy, permet en général de prendre le temps de développer pleinement son univers tout en ayant une intrigue bien menée. Ici, j'ai trouvé l'intrigue bien faite, même si le schéma reste assez classique, mais l'univers aurait mérité d'être davantage développé.
J'ai beaucoup aimé l'idée de cette île dont les habitants sont répartis sur quatre territoires en fonction de leur affinité à un élément. On a vraiment du potentiel, surtout avec ces Sans-Pouvoirs qui auraient permis d'aborder des thématiques intéressantes telles que la tolérance envers la différence (c'est abordé, bien sûr, mais pas de manière suffisamment approfondie à mon goût). Car dès qu'une personne qui ne développe aucun pouvoir est découverte, elle est séparée de sa famille et envoyée auprès des autres Sans-Pouvoirs, dans une forêt qu'on a bien voulu leur laisser comme terre d'exil. Et vu que ces Sans-Pouvoirs n'apprécient pas d'être traités ainsi et voudraient bien vivre dans un lieu plus sympa, ils se rebellent. C'est pourquoi ils ont été nommés les Renégats. 
Mais au final on est surtout centrés sur Falune et Gelane. Tilone,Voline et les Renégats sont là, et on en voit des représentants, mais on n'a pas le temps de découvrir leurs coutumes, leurs terres, etc. Du coup c'est frustrant. Toutefois il faut aussi tenir compte de l'intrigue, qui se serait probablement vite appauvrie si elle avait été étalée sur plusieurs tomes. Peut-être créer d'autres intrigues sur cette même île aurait pu être une solution, si la fin du roman ne changeait pas totalement la donne...

En tout cas l'intrigue est plutôt bien menée. Il y a des secrets, certains nous surprennent, d'autres moins car nous aurons réussi à les deviner avant qu'ils ne soient révélés. Il y a pas mal de rebondissements, avec des intrigues de cour, des complots et des batailles. Tout se tient et, même si nous n'aurions pas forcément agi de la même manière, les réactions des personnages face aux divers événements (et révélations) sont plutôt crédibles. Bien que le scénario reste assez classique, tant au niveau de la romance que de la fantasy, on se laisse rapidement happer par l'histoire de ce couple en pleine guerre de pouvoir, notamment grâce à la plume de l'autrice qui rend le tout fluide, agréable à lire.

En bref...
La reine courtisane est une romantic fantasy dont la richesse de l'univers aurait été bien mieux servie par un format en série, bien que l'intrigue convienne parfaitement à un format one-shot. Anna Triss s'inspire au départ des Mille et une nuits pour nous conter, d'une plume agréablement fluide, la rencontre entre deux êtres forts et fiers que tout oppose et qui pourtant se rapprochent dans leur quête de justice et leur besoin de reconnaissance. Secrets, complots, batailles, amours... Bien que nous ayons déjà vu ce schéma un bon nombre de fois, tout est réuni dans ce roman pour nous faire passer un bon moment de lecture.

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