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mardi 13 avril 2021

Le Sang et la guerre (Le Crépuscule des 5 Piliers T1) - L.A. Braun

 

 
Roman obtenu à l'occasion d'une opération Masse critique, je remercie donc Babelio et les éditions Livr'S. Je l'avoue, si j'ai choisi ce premier tome du Crépuscule des 5 Piliers, intitulé Le Sang et la guerre, c'est avant tout pour sa très jolie couverture. Ensuite parce que le roman avait déjà de bons commentaires sur les réseaux de lecture. Malheureusement je ne suis pas du même avis que la majorité des lecteurs de ce titre.

Héritière du duché familial, Lithana a grandi dans une cage dorée, loin des difficultés du vrai monde. En guerre contre les sorcières d'Akronia, sa mère, la duchesse d'Estaniel, consent à l'offrir en mariage pour mettre fin au conflit, en dépit de l'engagement sacré des fiançailles qui la lie à Augustus de Rossi. Les deux jeunes gens se voient alors privés d'un futur qu'ils avaient imaginé tout tracé.
Malgré ce geste de paix, de nombreuses questions demeurent. Quel rôle jouent les membres de la Sixte Pilastre ? Cette union constitue-t-elle le commencement d'un renouveau ou, au contraire, d'une chute vertigineuse ? La chute du peuple merinéen, de la religion pilariste, d'une terre à tout jamais perdue...

Bon, déjà, on peut dire que l'autrice a bien travaillé son univers, même s'il reste finalement très classique. Au début du livre, nous avons une carte du territoire (bon ça c'est plutôt habituel dans les romans de fantasy épique) ainsi qu'un calendrier créé spécialement pour l'histoire, qui démontre un cycle différent du nôtre (une année fait 324 jours et est divisée en six saisons). Dans ce premier tome, on se concentre sur deux pays : Merinéa et Akronia. Merinéa m'a un peu fait pensé à l'Italie, à cause des noms des personnages (Enero, Murcio, Giaccomo...) et du contexte. En effet, Merinéa est un pays côtier sans cesse menacé par les tempêtes, risquant à tout moment de disparaître sous les flots (on peut alors penser à Venise). C'est pourquoi les merinéens se sont aventurés dans le désert pour trouver de nouvelles terres habitables, et ainsi échapper au terrible destin qui les menace. Le problème est qu'ils ont attiré l'attention des akroniens, peuple vivant de l'autre côté du désert, qui ont vu cela comme une tentative d'invasion. Depuis lors, la guerre entre Merinéa et Akronia fait rage.
Akronia n'est pas encore vraiment explorée dans ce tome : c'est une menace constante mais que l'on ne voit concrètement que vers le dernier tiers du récit, et on entend rapidement parler de leurs coutumes lorsque Lithana étudie le pays dans lequel elle devra partir vivre. Akronia apparaît ainsi comme un peuple cruel et affreusement barbare, aux mœurs totalement opposées à celles de Merinéa. Alors que les merinéens placent la femme et l'homme à égalité, tant au niveau privé (la femme n'est par exemple pas obligée d'être vierge pour son mariage) que politique (certains membres du Conseil sont des femmes, et la mère de Lithana est Régente), les akroniens traitent les femmes (à l'exception des sorcières qui sont tout en haut de l'échelle hiérarchique) comme des esclaves. Au niveau technologique aussi, les deux peuples sont opposés : en Merinéa, on a une société certes médiévale, mais en plein essors industriel avec la création d'une technologie qui rappelle parfois un peu l'univers steampunk (oiseaux mécaniques, carrosses qui ne nécessitent pas d'animaux pour fonctionner, etc.) ; tandis que les akroniens vivent sans aucune technologie, la magie étant le point central de leur société. Je trouve cela trop facile de faire de l'ennemi un gros méchant peuple bien barbare, bien que nous en découvrirons peut-être quelques subtilités dans le second tome.
D'autant plus que le contexte bien plus lointain de cette opposition entre Merinéens et Akroniens, que le monde a oublié depuis longtemps mais que connaît la Sixte Pilastre, est plus complexe et intéressant qu'une simple opposition de coutumes. Je ne vais pas trop en dire, car c'est un des points que j'ai le plus apprécié dans cette histoire et qu'il vaut mieux le découvrir par soi-même. En Merinéa, la religion pilariste repose sur la vénération des Cinq Piliers, cinq héros qui auraient autrefois foulé la terre, et le rejet de la sorcellerie, vue comme une pratique infâme (on brûle ainsi les sorcières). Mais une secte, la Sixte Pilastre, prône l'existence d'un sixième Pilier, apparemment rejeté par les autres il y a bien longtemps, et se bat pour un retour à la vraie religion, celle des Six Piliers. Ainsi la Sixte Pilastre œuvre dans l'ombre dans l'espoir de sauver Merinéa de cette malédiction provoquée par les mensonges pilaristes, et qui serait à l'origine de la catastrophe qui s'abat sur le pays. A contrario, Akronia vénère les sorcières, qui sont haut-dessus de tout, vues comme les élues de leur déesse. Et au fil du récit, l'on se rend compte que ces trois religions sont étroitement liées...
L'autrice a aussi inventé tout un vocabulaire pour son histoire, en particulier pour la religion pilariste, qui permet de parfaire son travail de création de son univers.

On a donc un univers bien travaillé, riche et complexe, bien qu'assez classique dans son système, mais l'immersion a été difficile pour moi, notamment à cause de personnages sans relief et d'un récit trop lent.
Le résumé laisse entendre que les personnages principaux de cette histoire sont Lithana et Augustus, pourtant on les voit peu dans ce premier tome, davantage focalisé sur la duchesse d'Estaniel et les dirigeants de la Sixte Pilastre. J'ai trouvé Lithana et Augustus plutôt ennuyants, passant leur temps à se plaindre de leur sort. Certes, ce n'est pas agréable d'apprendre que la personne à laquelle vos parents vous ont fiancé contre votre gré, mais que vous avez fini par connaître et aimé, ne sera finalement pas celle que vous épouserez. Mais pendant les deux premiers tiers du récit, Lithana erre dans le palais à se lamenter sur la décision de sa mère de l'envoyer épouser un akronien, et se dispute à plusieurs avec Augustus toujours pour la même raison. Ce n'est que lorsqu'elle accepte enfin son départ qu'elle évolue et devient intéressante. Le problème c'est que cela n'arrive que vers la fin. Et il en va de même pour Augustus.
En revanche, on suit souvent la duchesse d'Estaniel, personnage typique du dirigeant qui fait passer son pays avant tout. Elle est ainsi le plus souvent en pleines négociations, soit avec le Conseil, soit avec la reine d'Akronia. Quant aux dirigeants de la Sixte Pilastre, qui œuvrent dans l'ombre, chacun d'eux est infiltré dans un rôle stratégique. Ce sont eux qui m'ont le plus intéressée, avec leurs secrets, qui ont suscité en moi la curiosité, le besoin d'avancer dans ma lecture pour comprendre leurs véritables objectifs. Enfin il y a Enero, second général de la Garde chargé d'enquêter sur la Sixte Pilastre. S'il ne m'a pas convaincue au départ, m'attendant à ne voir qu'un homme enamouré essayer de sauver la femme qui l'attire accusée à tort, ses péripéties me l'ont rendu plus intrigant. J'attends donc beaucoup de lui pour la suite.
Quant aux personnages akroniens que l'on rencontre, ils sont typiques du peuple barbare. Les guerriers semblent n'être que de grosses brutes. La reine se prend pour la huitième merveille du monde et considère tous les autres comme des déchets. En revanche son époux m'a l'air plus complexe, idem pour l'une des sorcières guérisseuse, mais à voir par la suite.

Si les personnages principaux ne m'ont pas convaincue, la lenteur du récit n'a pas aidé. Je considère ce premier tome comme une longue introduction. Le problème avec ce genre de tome introductif, c'est que que l'on finit vite par s'ennuyer à attendre sans cesse que les événements commencent enfin. J'ai passé mon temps à me demander quand est-ce que Lithana allait partir pour l'Akronia, car c'est quand même ce qui est mis en avant dans le résumé, mais cela n'arrive qu'à la fin. En fait, tout ce qui se déroule dans ce tome aurait pu en faire la moitié tant cela s'étire en longueur, les choses se mettant en place avec bien peu de dynamisme. Ainsi je n'ai vraiment pu entrer pleinement dans l'histoire que vers le dernier quart du récit, qui permet de terminer ce premier tome sur un bon rythme. Franchement, si cette fin n'avait pas été aussi intéressante, j'aurais abandonné là la série. Mais pour le coup, j'ai bien envie de découvrir la suite qui sera peut-être plus captivante. Espérons-le.

Petit point également sur l'écriture de l'autrice. L.A. Braun est correctrice et applique apparemment à la lettre les nouvelles règles orthographiques de la réforme de 2016. Notamment celle de l'accent circonflexe : cet accent n'est plus obligatoire sur les "i" et les "u", sauf si cela permet de distinguer le sens du mot (sur et sûr, par exemple). Autant j'ai l'habitude de voir le "i" sans son accent, autant cela m'a fait vraiment bizarre de voir cela avec le "u" : bruler, gout, etc. J'ai tellement l'habitude de les voir écrits avec l'accent (brûler, goût) que cela m'a perturbée dans ma lecture. C'est la première fois que je lis un roman qui applique cette règle-ci.
Bon ça c'est juste moi qui chipote, car à part cela, aucune faute de décelée, et la plume de l'autrice reste plutôt fluide.


En bref...
Le Sang et la guerre, premier tome de la série Le Crépuscule des 5 Piliers, sert surtout d'introduction à un univers bien travaillé, quoiqu'assez classique, mais dont le récit traîne malheureusement en longueur. Les personnages, sauf quelques exceptions, sont peu convaincants, et les événements peinent à survenir, s'enlisant dans un rythme particulièrement lent, hormis les derniers chapitres qui offrent des rebondissements intrigants promettant alors une suite peut-être plus captivante. Finalement, c'est l'univers riche et complexe qui fait l'intérêt de ce premier tome, l'autrice ayant créé un calendrier, un vocabulaire, des religions étroitement liées et des sociétés, spécifiquement pour son histoire, le tout avec cohérence.
Si je reste très mitigée sur ce premier tome qui m'a plutôt ennuyée, la fin m'a rendu espoir et enthousiasme quant à la suite.

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