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mercredi 25 novembre 2020

Pacte de sang (Le dernier Drae T1) - Raye Wagner & Kelly St Clare

 

 
Pacte de sang est le premier tome de la série Le dernier Drae, écrite à quatre mains par Raye Wagner et Kelly St Clare. J'avoue ne pas avoir lu la quatrième de couverture avant de commencer ma lecture et j'ai été plutôt surprise. À cause de la couverture j'ai cru qu'il s'agissait d'urban fantasy ou de romance paranormale, car c'est tout à fait le style de couverture utilisé pour ces sous-genres de la SFFF. Mais Le dernier Drae est en fait une série d'epic fantasy. Et, si c'est loin d'être un coup de cœur, j'ai tout de même passé un bon petit moment de lecture.
 
L'histoire se déroule à Verald, un pays en décrépitude dirigé par un roi tyran qui a sacrifié ses terres pour obtenir l'immortalité. J'explique : il existait des êtres, nommés phaetyns, qui possédaient le don de la terre et avaient une espérance de vie particulièrement longue. Le roi Irdelron, désirant régner à vie et ne voulant pas mourir, tua les phaetyns afin d'utiliser leur sang pour vivre éternellement. Mais sans phaetyns pour prendre soin d'elle, la terre devint malade et il fut de plus en plus compliqué de cultiver quoi que ce soit. C'est donc un pays mourant de faim que le roi gouverne à présent, et ce malgré le nouveau système mis en place. Ou bien plutôt à cause de ? Car les paysans sont chargés de cultiver du mieux possible les terres et la répartition des récolte n'est guère équitable (quel doux euphémisme !). En effet, ceux qui vivent au château et aux alentours ont de la nourriture en vois-tu en voilà, tandis que plus on s'en éloigne, moins le peuple a de quoi se nourrir convenablement.
Le peuple aurait pu se rebeller depuis bien longtemps si le roi n'était pas protégé par Lord Irrik, le dernier Drae, une espèce capable de se changer en dragon. Lord Irrik est lié au roi par un pacte qui le force à le protéger et à obéir à ses ordres, aussi est-il une véritable menace pour ceux qui ne respectent pas les règles.
Et notre héroïne va justement en faire les frais...

Ryn est une jeune fille de dix-sept ans. Bon, déjà, quand j'ai vu son âge, j'ai un peu tiqué car je m'attendais à un roman avec une héroïne adulte, pas une adolescente (encore une fois, la couverture m'a induite en erreur). Je ne dirais pas que j'ai été déçue, mais je m'attendais à plus de maturité pour cette histoire. Vous me direz, ce n'est pas parce que le personnage principal est un ado qu'il ne peut pas être mature. Et vous avez raison. Mais Ryn est un peu des deux : parfois elle a des réactions et des réflexions assez matures (probablement à cause du contexte), parfois pas du tout. Et le fait que l'histoire soit racontée de son point de vue, à la première personne, accentue cela. D'un autre côté, à Verald, les filles sont mariées dès l'âge de dix-huit ans, âge auquel elles sont alors considérées comme des adultes. Du coup, au niveau du contexte, on peut estimer que Ryn est quasiment une adulte. Mais dans la manière dont l'histoire est racontée, on sent quand même le côté ado. Aussi aurais-je plutôt classé ce livre en young adult qu'en adulte.
Bref ! Ryn vit parmi les pauvres, elle a un don tout particulier pour tuer les plantes et se retrouve à travailler à la taverne pour rapporter un peu d'argent. Elle vit seule avec sa mère qui, elle, est particulièrement douée pour faire pousser les plantes et travaille donc dans les champs. À Verald, les filles sont mariées à dix-huit ans pour faire des enfants, tandis que les jeunes hommes, une fois leur devoir conjugal accompli, sont envoyés se battre dans les guerres menées par l'empereur Draecon (Verald est un des royaumes faisant partie de son empire). Ryn pense un jour se marier avec son meilleur ami, car de toute façon elle devra se marier, et en même temps elle ne sais pas si c'est ce qu'elle souhaite vraiment, ne pouvant s'empêcher de rêver d'aventures, de voyages... bref, d'une autre vie.
Un jour, après une réunion clandestine des rebelles dans la taverne, Ryn rentre chez elle après le couvre-feu et attire ainsi l'attention des gardes qui se mettent à la suivre dès le lendemain. Elle parvient à les semer, mais la petite maligne ne trouve pas plus intelligent que de rentrer une nouvelle fois après le couvre-feu. Et ce soir-là sa vie bascule. Je passe certains éléments dont j'estime qu'il vaut mieux découvrir par soi-même, mais plusieurs choses se produisent ce soir-là, notamment sa rencontre avec Lord Irrik et des gardes, qui vont conduire à son arrestation.
La majorité du roman se déroule au château où Ryn se trouve captive, à subir les retombées d'un jeu de pouvoir qui la dépasse. En effet, parce que Ryn est capable de résister au souffle hypnotique du dragon, et parce que ce dernier sait certaines choses sur elle et sa mère, et qu'il a promis de la protéger, Ryn devient la cible du roi. Irdelron a besoin de garder l'ascendant sur son drae, et s'est rendu compte de l'attention que celui-ci porte à la jeune fille, aussi décide-t-il de se servir de Ryn pour le remettre à sa place. Cela va ainsi passer par un long séjour dans les cachots entrecoupé de nombreuses séances de torture. Elle se retrouve ainsi entre les mains du cruel Jotun, le bourreau attitré du roi, un sadique à l'état pur. La pauvre va essayer de tenir tant bien que mal, se focalisant sur les gens qu'elle aime et qu'elle souhaite protéger à tout prix. Mais Ryn ne sera plus la jeune fille innocente que l'on rencontrait au début du roman et va se rendre compte qu'il y a bien pire que la mort, une fin rapide devenant même une bénédiction. Heureusement, son voisin de cellule, qu'elle ne peut voir mais avec qui elle partage les maigres repas que l'on daigne leur donner, et un mystérieux jeune homme qui vient la soigner après ses séances de torture, lui permettent de tenir le coup, de ne pas abandonner. Mais entre la torture, les manipulations et les trahisons, Ryn a énormément de mal à garder espoir et à rester aussi forte qu'elle le voudrait.
 
J'ai trouvé le personnage de Ryn intéressant, mais davantage pour ce qu'elle subit que pour sa personnalité et certaines de ses réactions, qui m'ont parfois un peu agacée. Nous avons droit à pas mal de tentatives d'humour de sa part, qui pour moi sont bien tombées à l'eau, mais peut-être suis-je simplement insensible à son humour et que cela fera sourire d'autres lecteurs. Il y a tout un secret qui entoure Ryn et sa mère et, si l'on comprend assez vite celui de cette dernière, celui de Ryn est découvert bien plus tard. Pourtant, si l'on fait vraiment bien attention aux détails, des indices donnés dès le début peuvent permettre de découvrir le mystère qui entoure la jeune fille. Personnellement, je n'avais pas tout découvert tout de suite, mais j'étais quand même parvenue à comprendre certains éléments de ce secret. Bravo moi !
Le personnage qui, pour moi, est le plus intéressant est Lord Irrik, qui se révèle être quelqu'un d'assez complexe. Il est lié à ce roi cruel par un pacte et est ainsi obligé de lui obéir, mais il parvient parfois à détourner certains ordres sujets à interprétation. Et j'ai bien aimé la manière dont il interprète certains d'entre eux. Irrik est un homme froid, distant et, à la manière dont il se comporte en présence de Ryn, il donne l'impression de la détester au plus haut point, mais en même temps il fait tout pour la protéger. La jeune fille en a au départ une peu bleue, car il est un peu l'équivalent du croque-mitaine pour les enfants. Quand les enfants ne sont pas sages, les parents disent par exemple qu'il va venir les chercher pour les manger. Le peuple a développé tout un tas de croyances à l'égard du drae qui le font percevoir comme un monstre, mais l'on se rend compte, au fil de l'histoire, qu'il n'est pas si monstrueux que cela et qu'il est lui aussi victime de la soif de pouvoir du roi.
Nous avons, dans ce premier tome, deux personnages à détester : le roi Irdelron et le bourreau Jotun. Irdelron est un homme assoiffé de pouvoir qui a tué tous ses héritiers pour garder sa place sur le trône, et qui a été jusqu'à éliminer tout un peuple (les phaetyns) pour prolonger le plus possible son espérance de vie (et je ne parle pas de ce qu'il a fait aux draes !). Égoïste et sadique, il est surtout particulièrement malin et stratège, ce qui va causer de sérieux problèmes aux rebelles (et à Ryn). Jotun, s'il n'a pas été touché par la fée de l'intelligence, est toutefois aussi sadique que son souverain, qu'il sert avec dévotion. Il semble vouer une haine viscérale à Lord Irrik (probablement due à une sorte de jalousie envers son lien avec le roi) mais, n'ayant pas le droit de le toucher, il trouve en Ryn un parfait exutoire à sa colère (la pauvre, elle n'a rien demandé, elle...).
Ce sont là les quatre personnages les plus développés dans cette histoire, bien que le roi et Jotun le soient moins que Ryn et Irrik, mais on ressent leur présence constamment, telle une menace planant au-dessus de notre héroïne. D'autres personnages mériteraient que l'on s'y intéresse, cependant ils ne sont pas suffisamment présents dans ce tome pour que je m'y attarde ici ; peut-être seront-il davantage développés dans le prochain ?
 
Je râle un peu sur le résumé éditeur qui n'est pas terrible car il induit pas mal le lecteur en erreur. Premièrement on y parle d'Irrik comme d'un dompteur de dragons alors que c'est un dragon (il peut avoir une apparence humaine et une apparence de dragon). Il est certes capable de contrôler d'autres dragons, mais c'est parce qu'il est un alpha.
Deuxièmement, la fin du résumé laisse entendre qu'une romance va naître entre Ryn et un autre personnage, et que cela va prendre une grande place dans l'histoire. Et bien non : ici la romance ne prend jamais le pas sur l'intrigue. Elle est vraiment très légère et très particulière car l'on peut se demander si, étant donné les circonstances dans lesquelles les sentiments de Ryn se développent, il s'agit vraiment d'amour. Certes, elle s'attache fortement au personnage, mais c'est pour moi davantage lié au fait qu'il se montre doux avec elle tandis qu'à côté elle se fait torturer par le bourreau. J'ai trouvé cet aspect de sa captivité vraiment intéressant, ce n'est pas ce que je critique ici. Il s'avère d'ailleurs que les choses sont finalement bien plus compliquées que cela (mais je n'en dis pas plus, c'est un point assez sympa à découvrir). Tout cela pour dire que, pour moi, préciser l'existence d'une romance dans le résumé éditeur n'était vraiment pas nécessaire, au contraire. Cela donne surtout l'impression que l'on nous met cette information pour nous appâter, alors qu'il n'y a pas besoin, le speech de base étant suffisamment intriguant pour donner envie de découvrir cette histoire.
J'ai fini avec ma critique du résumé éditeur, je passe maintenant au texte en lui-même. Il n'y a pas grand-chose à dire, mais avec un récit écrit à quatre mains c'est toujours un peu délicat. Le style est un mélange de deux styles différents, parfois l'un prend le pas sur l'autre, parfois certains passages s'en ressentent. Ici le style ne m'a pas spécialement déplu : il est fluide, et l'histoire se laisse lire aisément. En revanche il y a pas mal de petites incohérences au sein du récit qui m'ont parfois bloquée. Par exemple, avec le traitement du temps et de la distance : j'ai eu l'impression que Ryn parcourait parfois la moitié du royaume en trop peu de temps, ce qui m'a donné l'impression que Verald avait davantage la taille d'une ville que d'un pays, contrairement à la description qu'en fait l'héroïne. Il y a plusieurs détails de ce genre qui se contredisent, ce qui était assez perturbant.
À part cela, et quelques facilités dans le récit, j'ai trouvé que l'intrigue était globalement plutôt bien menée, sans défaut majeur qui aurait pu gâcher l'histoire.
 
En bref...
Dans ce premier tome, Raye Wagner et Kelly St Clare nous font découvrir un monde en décrépitude où les puissants sont des tyrans exploitant le petit peuple affamé pour se gaver et exterminant tous ceux qui osent s'opposer à eux. Si l'héroïne n'est pas le personnage le plus intéressant de cette histoire, d'autres personnages qui gravitent autour d'elle ainsi que sa vie de captive compensent amplement cela, poussant alors le lecteur à tourner les pages pour découvrir quel sera le dénouement de cette intrigue plutôt bien menée. Et, malgré quelques incohérences au sein du récit, le style des deux autrices forme un tout agréable et fluide, offrant ainsi une lecture somme toute assez sympathique.
Ne serait-ce que pour en découvrir plus sur les draes et les phaetyns, je me lancerai dans la suite avec plaisir.

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